Villejuif Underground

Le Villejuif Underground, ce diamant brut qui ne demande pas à être poli – Episode 3 : L’après

Depuis le début de cette saga, nous ne cessons d’être en surface. Pour ce dernier épisode, nous allons au fond des choses. Nous essaierons d’étudier les rouages d’un début de succès et ses dangers insoupçonnés.

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Le Villejuif Underground  avec de gauche à droite : Antonio (clavier), Nathan Roche (chant, guitare), Adam (basse), Thomas (batterie, guitare)

« It’s a trap ! »

Célèbre réplique de l’amiral Ackbar dans Le Retour du Jedi, un « piège » est effectivement en train de se tendre pour le groupe. Un piège pas énorme et probablement illusoire mais néanmoins pas si délirant. Maintenant que la hype est là, que la réputation est bâtie sur une musique solide et largement estimée, qu’attendre de plus du Villejuif Underground dans les mois et les années à venir ? Car si la compagnie peut se rassurer d’avoir bien travaillé pour mettre au monde un très beau When Will the Flies in Deauville Drop?, n’oublions pas que l’accouchement s’est quand-même exécuté dans la peine, donnant quelques sueurs froides à nos pas trop joyeux lurons.

En effet, le stress n’a pas toujours était un compagnon de route bienveillant pour le groupe, éreinté mais au final soulagé de voir l’issue finale de ce périlleux voyage que l’on nomme « Sortir un second album qui va autant plaire que le premier ». C’est bon pour cette fois. Reste à savoir comment négocier le prochain itinéraire lorsque l’on est en dehors du circuit traditionnel et pourtant très observé.

Le Villejuif Underground ou le symptôme d’une industrie enraillée

Le Villejuif Underground est encore une jeune pousse qui a besoin de temps et d’espace pour grandir sereinement. Par ailleurs, adopter un style lo-fi attire généralement un public de niche, souvent moins envahissant et donc moins influent sur la production. Or, on constate que le schéma s’est pas mal inversé pour Le Villejuif Underground, sollicité de plus en plus tout en restant considéré comme un petit que l’on peut malmener à la  cour de récré.

C’est très étrange et ce sentiment s’est un peu lu dans les yeux de Nathan Roche, lorsque le public lillois s’arrachait des dédicaces en ce jeudi 17 janvier 2019. Qui oserait échanger avec le chanteur d’un groupe en devenir une horloge merdique contre un vinyle pressé avec soin ? Eh bien une jeune inconsciente, ne doutant de rien pour rouler ce pauvre Roche décontenancé devant tant d’aplomb. Une scène navrante, peut-être anecdotique mais criante de vérité. Plus le temps passe et plus les agitations émotionnelles se feront virulentes.

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LELO JIMMY BATISTA

Il est encore trop tôt pour savoir comment manœuvrer avec le collectif. C’est comme si l’on s’adressait à un adolescent dans un corps d’adulte. Pour l’instant, le groupe affiche une imperméabilité devant tout ce remous à coup de punchlines et de décontractions assumées. Mais ne vous méprenez pas, le Villejuif Underground n’est pas si lunaire et déconnecté que ça. C’est en étant distant et vigilant que le quatuor trouve refuge pour le moment, derrière justement une attitude de « branleurs » comme aime à le rappeler un peu tout le monde, à tort…

Psychologiedecomptoir.org en pleine analyse

Pourquoi tant de simagrées alors que tout baigne ? La raison est simple, la peur, dans un futur alternatif, d’un « auto sabotage » déplorable. Tous les scénarii catastrophes sont imaginables : un troisième album volontairement inaccessible, indigeste ou bien inégale, voire une pause du groupe. Tout cela pour avoir un peu de leste. Parce qu’à force de mettre des sous dans la machine, de déborder de flagornerie, de congratuler à tout va, on va finir par péter la machine qu’on chérissait tant.

Deux cas de figure, deux conclusions différentes face au succès

On se souvient d’une époque pas si lointaine où un les adolescents saignaient sur Kids, hit craché par le téméraire duo MGMT. La paire a très mal vécu leur consécration, au point de se replier sur soi avec MGMT, leur troisième album studio. Très obscur dans sa composition, l’album sort de sa cachette le bide à l’air pour nous déplier 10 titres expérimentaux, opaques, rêches. Tout n’était pas à jeter, cela dit, avouons que la surprise était totale et certainement préméditée. C’est par ce biais que le duo s’est mis en retrait des projecteurs. Si leur destin est plus heureux grâce au très bon et surtout plus hospitalier Little Dark Age sorti en 2018, d’autres formations n’ont pas eu cette fin là, à l’instar du grand regretté WU LYF

Vous vous souvenez d’eux ? C’était la révélation de 2011, le renouveau du rock indé made in UK. La puissance, la sensibilité du groupe, prise dans la voix étranglée du leader Ellery James Roberts avait scotché la Presse. Hélas, c’est devant tant d’admiration, bien trop pesante pour les anglais, que WU LYF s’éteint tragiquement après seulement un seul album au compteur, si extraordinaire et si fort. Quelle tragédie, en particulier quand on tourne la page du livre pour découvrir cette purge (oui madame, cette purge) qu’est Lost Under Heaven, nouveau projet plus que moyen d’Ellery James Roberts, qui additionne les chansons oubliables et les performances lives consternantes… Quel gâchis, vraiment.

Du coup on fait quoi ?

Plutôt que de l’étouffer, laissons le petit oisillon voler peinard dans sa prairie. Donnons-lui un peu d’air. Un raisonnement dissonant, il en convient, quand on connait les difficultés de vivre de son Art. C’est d’autant plus paradoxal du fait qu’une promotion est indispensable pour tout artiste en quête de reconnaissance. Tout l’intérêt, c’est d’avoir un public pour lequel on joue. Combien de fois a-t-on déjà entendu autour de soi: « Franchement ma poule, ce groupe mérite tellement d’être plus connu ».

De surcroît, chaque artiste a ce sacerdoce à endurer. C’est bien tout le problème. L’industrie musicale (et pas que) est cruelle ! Certes, cette problématique est d’une banalité et d’une évidence sans nom, mais si elle était vraiment intégrée chez tout un chacun, nous n’aurions probablement pas les cas de figures cités antérieurement.

Si la recette miracle n’existe pas, tâchons au moins d’y aller mollo avec nos garnements. Laissons les respirer le moment venu. Laissons-les tenter, se reposer, créer, se ramasser la gueule au sol, se planter pour mieux recommencer derrière (ou pas). Antonio répète souvent cette phrase : « On ne sait pas si cela continuera ». Une leçon de lucidité si simple et pourtant si capitale. Faire carrière dans le monde de l’Art est tellement particulier qu’il est tout bonnement impossible de prendre les choses normalement. Nous verrons bien ce qu’il en retournera pour eux même si nous croisons fort les doigts pour l’arrivée d’un nouvel album.

Il est certain que cette analyse, sans conteste trop poussée (quand on aime, on ne compte pas), n’est que le fruit de spéculation. Espérons avoir tort. Espérons que toute cette vague mêlée de stress, d’espoir, d’exigence, d’excitation, de frustration, de relâchement serve de grain à moudre pour l’arrivée de nouvelles compositions tout aussi perturbantes que celles que l’on prend grand plaisir à écouter. “Don’t believe the hype” disait Alex Turner dans le clip I Bet You Look Good On The Dancefloor. Qu’on se le dise, le Villejuif Underground fait parler et c’est tout le bien/mal qu’on lui souhaite. Longue vie à lui ! Merci pour ce moment et à la prochaine les gars !

http://www.bornbadrecords.net/artists/villejuif-underground/

https://www.facebook.com/levillejuifunderground/

Marcus Bielak

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