Edito de la semaine

L’edito du Lundi

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C’est la 900ième aujourd’hui… 900 articles… Une sacrée base de données en somme. Pour le coup, c’est un Edito très politique et très musical. Car c’est le moment je crois de regarder le monde tel qu’il est et de se lever, d’essayer de changer les choses, de dire les choses telles qu’on les voit.

Ce n’est certainement pas nouveau mais le monde d’aujourd’hui a deux fléaux : la guerre et la pauvreté. S’il semble que les guerres d’aujourd’hui ne puissent être enrayées, la pauvreté de son côté a de plus en plus de voix et pourrait, avec des mesures politiques rapides (Revenu Minimum Universel), être contrôlée sinon imposer une certaine décence dans un monde qui doit s’adapter aux nouvelles évolutions du monde du travail. L’avantage est que ce type de mesure est aussi bien de droite que de gauche, même si personne ne s’entend encore sur le montant d’un tel revenu. On croise l’idée en Finlande, dans le programme de Podemos en Espagne, en Suisse et bien-entendu en France. Au delà d’assurer un revenu à tous, cette mesure permettrait de redevenir décideur sur le marché du travail.On pourra refuser une offre si cela ne nous convient pas niveau salaire ou intérêt des tâches vu que vous aurez déjà un revenu lors de votre présentation à l’entretien d’embauche. Utopie ? Non, pas vraiment, les mutations sont telles aujourd’hui que les sociétés doivent s’adapter au risque de devoir payer une multitude d’aides différentes à un panel très diversifié. Le RMU est maîtrisé puisque chacun toucherait le même montant, à vie, ceci se substituant aux aides de montants inférieurs. Début d’une oisiveté généralisée ? Non, par contre, multiplication des métiers freelance, sûrement. La France redeviendrait peut-être entreprenante et entrepreneuse, ce qui pousserait l’économie dans le bon sens. Nous verrons ce qu’il adviendra de l’idée. Pourquoi  je vous parle de cela ? Tout simplement parce qu’une artiste vient de sortir un album sur le sujet. Enfin pas sur le RMU, sur la pauvreté (et la guerre, les deux pouvant être liées) en donnant la parole à ceux qui en souffre. The Hope Six Démolition Project est un album définitivement politique.

Un album journalistique ?

PJ Harvey a beaucoup voyagé à travers le monde pour accouché de cet album. Déjà en 2011, l’artiste abordait la politique au travers de sa propre perception de témoignages et d’écrits d’une guerre mondiale dans Let England Shake. Ici, elle donne la parole aux autres en relatant ce qu’elle a vu, ce que les autres vivent. C’est ce qui en fait un album plus engagé encore, et surement plus imbriqué dans le monde actuel car plus live dans la façon de recenser les expériences, les instantanés, et finalement, plus journalistique (c’est d’ailleurs Paul Schwartzman, reporter du Washington Post qui lui a servi de guide dans les quartiers pauvres de Washington D.C). Plus live aussi dans son enregistrement, sorte de prolongement naturel de la collecte d’informations puisque le public pouvait voir, au travers d’une vitre, le disque se faire. Un peu comme un tableau accroché au mur. Un miroir dans le miroir en somme. Je regarde le tableau vivant d’un groupe qui me parle de ce que vivent les gens. Je regarde et j’écoute.

Nous vivons dans la même réalité

Le but ici n’est pas de donner des leçons, il est de brosser la réalité brute. A nous de réfléchir dessus ensuite. L’avantage de cet album est qu’il met en relief des choses que l’on relègue souvent au fond d’un tiroir, dans notre tête, avec l’étiquette: On sait que cela existe mais on n’y peut plus rien. Harvey essaie de vous faire réouvrir ce tiroir, de vous le jeter en pleine face pour vous dire juste : « si l’on continue à fermer les yeux, nous sommes des lâches ». Voilà ce que j’ai vu, nous n’avons peut-être pas la même vérité, mais nous partageons la même réalité. Ne l’ignorez pas, agissez ! Ce parti pris est d’ailleurs, au travers du soin dans l’écriture des textes, bien plus mis en avant que la musique. Pour autant l’orchestration est ici complètement au service des textes et de leurs propos. Et même si l’artiste a été bêtement critiquée pour certains des propos contenus dans Community of Hope, notamment, il n’en est pas moins vrai que la vérité peut blesser surtout lorsqu’elle tente d’exister pour se partager. On s’empresse alors de la dénigrer  la démarche en la taxant d’incomplète afin d’en diminuer les propos. N’empêche que la démarche d’Harvey ici est de décrire ce qu’elle voit, pas de faire une thèse politique sur le pourquoi du comment.

Retour vers une certaine simplicité

A l’inverse de Let England Shake, ce dernier album est plus brut, plus live, plus simple. On s’éloigne donc des samples (sauf pour Ministry of Social Affairs) et des guitares misent en échos. C’est plus punchy, plus direct. Les chœurs de basse (y compris le gospel et les percussions sur River Anacostia) appuient sans alourdir, tout en posant une ambiance grave, en contrepoint de la voix de PJ Harvey, plus aérienne que jamais. L’abondance des mélodies, qui suit et ponctue les textes, fait que le disque a besoin de plusieurs écoutes pour bien se digérer. Mais quand la qualité est là, qu’importe. The Hope Six Démolition Project présente une beauté simple mais qui ne s’arrête pas à l’image. C’est aussi un album profond même s’il n’apporte aucune réponse et n’est qu’une suite de témoignages de personnes croisées, mis en musique.

C’est terminé pour aujourd’hui, j’espère que vous aurez envie de vous frotter  à cet album qui en vaut la peine, même si ce n’est pas un chef d’oeuvre, ni son meilleur album (qui d’ailleurs sera différent d’une opinion à l’autre…) mais qui a énormément de chose à offrir. Vendredi nous nous retrouverons pour l’interview de Versper Land pour son projet Ten Poems of Emily Dickinson, mon coup de coeur du moment.

Greg Pinaud-Plazanet

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