Edito de la semaine

L’Edito du Lundi

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Nous sommes le 10 novembre, les prémices de l’hiver ont d’ores et déjà installé leurs oripeaux sur nos épaules, faisant ainsi peser le poids des saisons qui passent sur nos existences à l’image de ces vols d’oiseaux migrateurs, qui s’en vont toujours vers des ailleurs, poussés par leurs ailes… Nous sommes le 10 novembre et demain nous célébreront le courage de ces hommes gris bleus , qui déjà enterrés dans des tranchées boueuses, ont donné leur vie pour tenter de sauver les valeurs qui étaient les nôtres. Alors que la mitraille les fauchait de son chant funèbre, ils ont continué à avancer au son des sifflets. On s’en souviendra demain  au son des fanfares.

Je pense aujourd’hui à toutes ces autres guerres, de par le monde, qui n’auront sans doute jamais d’armistice, desquelles on ne célébrera pas les morts, ceux-là mêmes qui rentrent encore aujourd’hui au pays seulement vêtus d’un drapeau. Et je me dis qu’il y en aura toujours trop, de ces conflits nés de l’existence de la propriété, de l’invention de l’argent et de la violence qui lui est inhérente, nés de la convoitise et de l’ambition, nés de la nature humaine. Car le problème est finalement là, dans ce corps que l’on nous prête pour fouler le sol durant quelques décennies… Le problème c’est nous, les hommes. Nous avons la faculté de libérer ce qu’il peut y avoir de pire en nous, et en même temps être capables d’offrir le meilleur. Si tous les hommes n’avaient été capables de n’être que musiciens, le monde serait sans doute plus beau. Imaginez donc un monde de Bach ? De Dvorak ? De Saint Saëns ? de Shumann (Clara, car les femmes ont une place bien plus grande que l’on ne le croit dans la musique… Demandez donc à la femme de Bach qui aurait composé nombre des oeuvres attribuées au maitre…) Des guerres qui ne se résumeraient qu’à des joutes de notes explosant sur des portées, couchées sur des cahiers, embrigadées dans une symphonie, se faisant descendre d’un bémol ou montant à l’assaut d’un dièse ?

Mais laissons vos pensées vagabonder là-dessus lorsqu’elles en auront envie, aujourd’hui je ne vais pas vous parler de musique classique, non, bien que les albums présentés ce jour soient d’un certain classicisme, ce qui ici, n’enlève rien à leurs nombreuses qualités. Nous allons commencer par un album qui ne sortira que demain mais qui a déjà fait couler beaucoup d’encre : Sonic Highway. Celui que l’on ne présente plus comme un ancien de Nirvana tellement ce n’est qu’une des facettes de ce que cet artiste peut offrir, s’est mis en tête, après 20 ans d’existence, de poser ses instruments dans huit villes américaines et d’enregistrer des morceaux avec des légendes locales, attendant souvent jusqu’au dernier moment pour écrire les textes des chansons qui allaient être fortement influencées par cette expérience assez conceptuelle. Cette démarche ne pouvait venir que d’un groupe déjà solidement établit dans la conscience collective rock d’aujourd’hui. Le petit problème de cet album est peut-être au niveau des textes, Dave Grohl n’étant pas un songwriter assez talentueux (je vois d’ici la levée de boucliers des fans… Calmez-vous les gars et buvez un coup) pour se permettre une écriture à la volée tout en restant un poil poétique. J’en veux pour exemple des références ou des images bien trop peu recherchées (Outside et, dans un tout autre genre, Something From Nothing). Cependant son succès n’a toujours été dû qu’à l’honnêteté de ses textes, s’adressant ainsi de façon directe et simple aux auditeurs. Si l’on additionne cela au fait que musicalement, en dépit de quelques bonnes trouvailles comme cette section de cuivres sur In The Clear, je ne doute pas que l’album fonctionne tel quel. Mais étant fan des Foo Fighters, et bien qu’ayant passé un excellent moment à l’écouter, je ne pouvais pas vous livrer une impression lisse et sans nuage, il faut savoir rester objectif et je ne considère pas vraiment cet album comme allant de soit dans la discographie fructueuse du groupe, trouvant le précédent beaucoup plus assumé et identitaire que celui-ci. Mon morceau préféré de l’album ? Le dernier: I Am A River. Ce qui m’intéresserait maintenant de voir, c’est le documentaire qui va avec…

Et puisqu’on parlait de rivière il y a un instant, Endless River, qui sort aujourd’hui, sera le point final d’une discographie s’étalant sur presque 50 ans (en 2015, je m’attendais d’ailleurs à ce que cet album ne soit publié que début d’année prochaine…) d’expérimentations musicales : Celle des Pink Floyd. La reformation du groupe, qui était apparu pour la dernière fois en live au cours de l’année 2005, avait définitivement été enterrée en 2008, année qui vit la disparition de Rick Wright, l’une des pierres angulaires du groupe. Cet album arrive donc vingt ans après The Division Bell, dernier album studio jusqu’à aujourd’hui. Malgré l’absence de Wright, ce point final s’exécute bel et bien à huit mains puisque sur presque tous les morceaux, le claviériste est présent. En effet il ne s’agit pas là d’un nouvel album au sens exact du terme. Nouveau pour l’auditeur, certes. Mais ce disque est une suite de morceaux enregistrés au moment de The Division Bell et retravaillés pour une sortie commerciale, beaucoup des parties de Richard Wright ont donc été gardées. Ce sont des morceaux principalement instrumentaux, où l’on peut, ça et là, reconnaitre le recyclage de certains riffs, certains tempo, certaines lignes de claviers (comparez donc Anisina et Us And Them ou encore Skins et Saucerful Of Secrets par exemple…) mais qui pour beaucoup représentent sans doute la direction que le groupe aurait pu prendre après The Division Bell. La voix de David Gilmour, conférant pourtant une forte identité au groupe est souvent tue, mais c’est un choix assumé car à l’image de la couverture choisie à l’album, la musique seule vous transporte littéralement, bien mieux que les mots lors de l’écoute de cet opus. La dernière piste, Louder Than Words semble bel et bien avoir été écrite dans l’esprit d’un chant du cygne pour le groupe: « The sum of our parts/ The beat of our hearts/ It’s louder than words« …

Après huit ans d’absence des platines mais huit ans à tourner sans presque s’arrêter, Damien Rice revient aujourd’hui avec My Favorite Faded Fantasy, un disque  qui établit Rice comme pilier d’un genre qu’il est l’un des seuls à arpenter. Débarrassé des vestiges de O et 9, Damien Rice livre ici un album majestueux qui ouvre sur une chanson sensible tirée par une guitare électrique arpégée et sa voix tout en falsetto. Huit pistes, cinquante minutes de musique, Rice ne s’embarrasse pas des formules habituelles de la pop (l’une de ses pistes dépasse les cinq minutes…) et se démarque ainsi de ses contemporains. Vous n’entendrez probablement jamais ses (ces) chansons à la radio, leur construction même les en empêche. Ce sont de petits poèmes qui prennent du temps à gagner toute leur mesure au fil de l’écoute. Elles sont d’ailleurs à l’image de la construction de l’album lui-même. En effet, après quelques morceaux, l’album s’installe et devient plus folk, se rapprochant ainsi plus des albums précédents (The Greatest Bastard, colour Me In), ou en adoptant du moins les mêmes mécanismes.  My Favorite Faded Fantasy jouit d’une mélancolie sublimée par des crescendo aux accents dramatiques ( la magnifique et poignante The Box), d’une intensité qui ne reposait auparavant que sur la guitare et la voix, mais qui aujourd’hui a trouvé une nouvelle dimension dans l’orchestration les habillant.

Voilà, en ce jour de pont, j’aurais pu vous parler aussi d’autres sorties mais nous reviendrons probablement dans la semaine sur le dernier Shaka Ponk. En attendant, passez une bonne fin de bon gros week-end (pour les plus chanceux) !

Greg Pinaud-Plazanet

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