Review

DJ Zebra et son Bagad débarque à « Funk-sur-Mer »

La musique celtique a ceci de commun avec les musiques folkloriques auvergnates ou basques un relatif désamour ou désintérêt. Ce désintérêt va de pair avec une évolution du monde et de la façon d’écouter de la musique, et un relais médiatique parfois inefficace.

Et pourtant, la musique celtique bretonne est la moins pire, celle qui souffre le moins. Quoiqu’on en dise, et qu’on en pense, Nolwenn Leroy et son album Bretonne a boosté ce style de musique en le « popisant » (si on me permet ce néologisme). Résultat : 1 million de ventes. L’œuvre de Zebra aujourd’hui représente son penchant moins pop, plus rock et en ce sens plus intéressant.

« Zebra et Bagad Karaez », le nouveau projet du « roi du bootleg »

« Zebra et Bagad KARAEZ » n’est donc pas une tentative de surfer sur la vague de Bretonne. L’histoire de la rencontre de ces deux univers musical est en fait, une sorte de non-rencontre : Zebra est, en tant que DJ, un OVNI. Proclamé « roi du bootleg », ce style qui consiste à faire rencontrer deux morceaux de musique qui cohabitent alors ensemble, il traine ses platines, sa guitare depuis 2003 à peu près partout, y compris sur notre bande FM, tour à tour sur France Inter, Virgin Radio, Le Mouv’…La radio qui lui donne l’espace pour réaliser ses fantasmes musicaux de bootlegers, c’est Oui FM, qui le dote aussi d’une webradio et d’un show le vendredi de 21h à 23h et le samedi de 1h à 3h. Bref, Zebra est DJ, musicien (il a fait de nombreux albums), et fan avant tout de musique, comme lorsqu’il rend hommage à Michael Jackson quelques jours après sa mort aux Francofolies, un des rares hommages honnêtes. DJ Zebra, c’est aussi une discographie impressionnante : il touche à tout, Woodstock, BO de films….

Il croise donc en 2008, aux Vieilles Charrues, le chemin du Bagad Karaez, une sorte d’institution historique mêlant pipe-bands écossais (cornemuses et caisses claires) et bombardes bretonnes. Il renait après de longues périodes d’inactivité due au démantèlement du réseau ferroviaire breton : en 1993, il débute ses cours de musique. Dans les années 2000, suite logique de son perfectionnement, il devient un des fers de lance de la musique bretonne en remportant de nombreux prix, signe de la montée de 5ème à 2ème catégorie. C’est justement après cette victoire en 2011 que Zebra et le Bagad Karaez fondent en se rencontrant une deuxième fois, ce qui sera leur histoire musicale.

Histoire musicale car ce qui accompagnera l’album qui sortira le 20 octobre, c’est un documentaire concernant l’album. Sorte de « making-off », produit par Sombrero, il sera diffusé sur une chaine de télévision française en octobre et sortira en DVD. Appelé « Un Zèbre dans le Kreizh Breizh », le documentaire est réalisé par Bertrand Basset et cible la dernière année écoulée, le temps de l’album.

Zebra revient plus rock que jamais, accompagné d’un bagad celtique de qualité.

Mais que trouve-t-on alors sur cet album ? Non pas de la musique celtique brute, mais une musique celtique arrangée, magnifié par les talents de DJ Zebra, mais aussi du réalisateur, Marlon B (responsable entre autres de Brigitte et de Carmen Maria Vega). Là encore le but est différent de celui de notre chère Nolwenn, comparaison commerciale oblige. Délibérément, à l’écoute, on comprend que nous ne sommes pas dans le folklore mais dans l’œuvre musicale. Pour preuve : les morceaux sont originaux, créés pour l’occasion. On a même l’apparition de plumes musicales francophones comme Arno ou Cali. La seule exception, c’est l’excellente reprise de Right Here, Right Now, de Fatboy Slim. Normal pour un DJ comme Zebra de reprendre cette chanson…. mais pas forcement très normal d’entendre le refrain à la cornemuse. L’effet est fantasmagorique : l’exercice de style est réussi.

Qu’on ne s’y méprenne pas : même si dans de nombreuses chansons, le penchant de Zebra pour l’ambiance DJ reprend le dessus (« Le Pouvoir des Pierres », Celtic Suckers, Zebreith, Space Breith l’Intro-, l’album est majoritairement rock. Le Pouvoir des Pierres est une des chansons symptomatique de ce fait, aux paroles mystiques et à écouter sagement : il fallait oser faire dire à Cali « As-tu déjà senti le pouvoir des pierres / as-tu connu l’orgasme dans le Finistère ». Le premier single, Plus rien ne m’arrête, aux influences rockabilly psyche version Doors, cite de nombreux morceaux de rock français (Osez Joséphine / Crache Ton Venin, et les nombreuses références à Noir Désir). Du rock, mais d’autres genres aussi avec le disco-rock Funk Sur Mer, qui porte bien son nom, et qui raconte, telle Ulysse et ses sirènes, le cas d’un équipage de marins bretons attirés par la musique funk. Le morceau en collaboration avec Arno est aussi à savourer sans conteste : Vive ma liberté est un des grands morceaux de cet album au son délibérément unique.

« Zebra & Bagad Karaez », un essai de patriotisme breton sans la caricature folklorique © Diane Hion [www.dayane.book.fr]

Loin de tergiverser sur ce point, cet album a le mérite de dé-ringardiser la musique celtique (si on considère cette dernière comme ringarde). Le Bagad Karaez joue à ce niveau excellemment le jeu, en accompagnant parfaitement ce disque teinté de patriotisme breton. Loin d’être inutile, ayant déjà ravi les critiques (telles Didier Varrod, de France Inter), cet album est probablement un des albums de l’année. Loin des caricatures classiques. Que demande le peuple (breton) ?

Zebra et le Bagad Karaez seront en concert le samedi 10 novembre au Festival Mots-Zik Sous Les Pins à Saint-Jacut-les-Pins (Morbihan), le mardi 13 novembre à Paris à l’Alhambra, le jeudi 22 à Rennes à l’Etage Enfin, le 7 décembre, ils seront au Family à Landerneau (Finistère).

By Mickael Chailloux

Une réflexion sur “DJ Zebra et son Bagad débarque à « Funk-sur-Mer »

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