On ne présente plus Green Day, trio punk rock californien qui a déboulonné les codes du genre punk depuis le début des années 90. Après 11 albums et bientôt 30 années de bons et loyaux services, la bande à Billy revient avec un nouvel opus tout fou tout rock, Revolution Radio. Et comme un nouvel album de Green Day, on est particulièrement impatient de savoir de quoi ça va retourner cette fois.
On peut commencer par vous jeter quelques lignes de contexte ici. Car il y a eu pas mal d’événements du côté de chez Green Day depuis leur trilogie Uno, Dos, Tré, sortie fin 2012. Premièrement, ces disques furent les premiers depuis une décennie à être accueillis assez tièdement par les critiques et les fans du groupe. Trop étalé, trop pop, le projet – sans être un échec – n’a pas su répondre aux attentes qu’il avait posées : succéder à deux opéras punk immensément populaires n’est pas une tâche aisée. De plus, en pleine promotion de ces disques, le groupe crée un scandale lors d’un concert durant festival iHeartRadio. Le chanteur Billie Joe Armstrong, sous l’influence d’on-ne-sait-trop-quoi (je vote alcool et médicaments, mais on connaît ses vieux penchants pour le repoudrage de nez), interrompt le concert car leur set était raccourci, avant d’insulter l’organisation, et au passage Justin Bieber.
« I’m not a fuckin’ Justin Bieber ! », on sait Billie, pose cette guitare s’il te plait.
Il a ensuite défoncé sa guitare sur scène, avant de faire un doigt d’honneur à l’organisation et de partir en coulisses (lien à la fin de l’article, on est pas des animaux). Suite à cet incident, BJA est parti en cure de désintoxication. Les choses ne se sont pas arrangées, car la femme du bassiste Mike Dirnt a dû combattre un cancer. L’activité du groupe a donc sérieusement été ralentie pendant plusieurs années, jusqu’en 2015, année où le groupe a (enfin) été inclus au Rock&Roll Hall of Fame, et a annoncé la sortie prochaine d’un nouvel album. Un an et trois singles plus tard, voilà Revolution Radio.
Et spoiler alerte : c’est du bon. Pas du tout bon, mais il y a dans ce disque de quoi satisfaire à peu près tout le monde, des non-initiés aux fans du groupe, de toute génération.
Une fois n’est pas coutume on commencera par les points négatifs. Certaines des chansons de cet album (à l’ instar de la trilogie Uno Dos Tré) ne sont pas indispensables et ressemblent même à des resucées de ce que le groupe a déjà écrit précédemment. Too dumb to die a beaucoup de similarités avec Church On Sunday de l’album Warning, Outlaws -outre sa mollesse- et est très inspirée de Last Night of Earth de 21st Century Breakdown. Troubled Times est quant à elle quelconque, pas désagréable à écouter, mais elle ne réussit pas à afficher la couleur musicale du groupe : généralement, on reconnaît un titre de Green Day assez facilement.
Ordinary World est la chanson tirée du film du même nom où BJA fera ses premiers pas au cinéma, dans le rôle d’un quarantenaire au passé punk qui rêve de vivre de sa musique. La chanson est une ballade (Green Day n’est pas étranger à l’exercice), mais ce titre ne possède pas un bagage émotionnel aussi important que leurs précédents essais plus réussis (Good Riddance, Wake me Up when September ends, Amy pour ne citer que ceux là).
Pour revenir à des aspects plus positifs, et dans les points qui n’ont pas changés : Armstrong est toujours un auteur et un mélodiste très talentueux. Chacun des titres possède une ambiance particulière. Les textes mêlent régulièrement des éléments personnels de la vie du chanteur avec des événements récents de notre histoire commune : Bang Bang évoque certains épisodes d’attentats de ces dernières années, Revolution Radio est inspirée des manifestations Black Lives Matter, tandis qu’Outlaw parle de la jeunesse borderline du chanteur et du bassiste Mike Dirnt (braqueurs de voitures et petits délinquants) et Young Blood est dédiée à la « version » de 22 ans de sa femme Adrienne.
Lien Bang Bang (lyrics) https://www.youtube.com/watch?v=mg5Bp_Gzs0s
Les textes sont bourrés de phrases inventives, drôles, touchantes : « I sit alone with my thoughts and prayers, Scream out my memories as if I was never there » « If this is what you call the good life, I want a better way to die » (Forever Now), « Are you scared to death to live? » (Still Breathing)…
Et bien sûr, certaines des chansons de cet album vont rapidement devenir des classiques du groupe. Les trois premiers singles (Bang Bang, Revolution Radio et Still Breathing), sont toutes les trois réussies, mention spéciale à Bang Bang, qui a fait saliver tout le monde sur cet album pendant un mois et demi avec son riff énervé, son refrain incroyable et une batterie tranchante de Tré cool qui délivre un break superbe en fin de chanson. Dans ces réussites, Forever Now vient s’ajouter au désormais traditionnel titre « long » de l’album : s’il n’a pas le panache de Jesus of Suburbia ou des très injustement sous-estimés Dirty Rotten Bastards et Homecoming, le titre très bien construit et très entrainant. La chanson Say Goodbye est incroyable, le rythme des percussions et la mélodie combinée de la voix principale et des chœurs se mêlent parfaitement sans jamais se faire de l’ombre.
Ce Revolution Radio ajoute donc une pierre rock honnête au monument Green Day, avec quelques titres excellents, et d’autres un peu moins (je n’aime pas les ballades, vraiment). Mais revenir à des bases plus simples après deux opéras punk et un triple CD de cette manière (réussie), c’est non seulement fort, mais c’est aussi très humble. Alors, merci Green Day !
Et ça c’est le lien dont je vous parlais au début de l’article. Auquel vous ne pouvez pas accéder sans URL direct. Me remerciez pas, c’est pour moi.
Baptiste Chausson