Grands Classiques/Review

Shaka Ponk: The White Pixel Ape. La double review du PDR

Hétérogène mais travaillé

Le rock est certainement un genre à la lisière des mondes, aujourd’hui dépassé, presque confidentiel, un petit ru à l’orée des bois touffus et imperturbables… Le vent balaie les plaines et ne reste plus en surface que les feuilles mortes… Mais parfois, la lumière vient frapper de sa douce volupté le léger filet bouillonnant, et celui-ci revêt alors une parure insoupçonnée, explosion de couleurs vaporeuses… Ainsi naît la fusion des éléments et ainsi se présente au monde l’étrange Goz, sage aux allures simiesques venu prêcher la bonne parole au monde…

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Shaka Ponk n’a peur de rien, ose tout, et part même un peu dans tous les sens. Les vagues successives d’Electro, Rock, Hip-Hop, Reggae, Funk et même Ska se croisent et se décroisent, formant un ballet d’une folle énergie parfois dissonant mais toujours débridé et sans prise de tête. Une onde de pur plaisir relativement festive, on sent parfois même l’influence prégnante de la Mano Negra notamment dans le morceau Black Listed certes toute proportion gardée…

Des morceaux comme Lucky G1rlScarifyBlack ListedWOtz Goin’ONStory O’my LFGimme Guitarrrrra prouvent le consistant travail du groupe sur les sonorités, les compositions et la production malgré l’hétérogénéité de l’ensemble. On pourrait peut-être reprocher ici au groupe le manque de ligne directive mais ces membres l’assument parfaitement et le revendiquent même tout au long de ce voyage sonore au final plutôt Rock & Roll.

Le groupe est généreux, ouvert, empli de bonnes intentions, peut-être même trop parfois… L’album se perd en longueurs inutiles comme sur les morceaux Last Alone,  la fin d’ Altered Native Soul ou encore Heal Me Kill Me certes sensuelles mais mal placées…

Shaka Ponk est pourtant avant tout un formidable groupe de scène et il y a fort à parier que tous les morceaux ici présents prendraient une nouvelle dimension en live. So, rendez-vous sur les routes et dans la fosse de préférence, ça risque de bouger sévère car Shaka Ponk est d’ores et déjà programmé dans la plupart des festivals 2014…

À bon entendeur, salut, m’en vais en griller une…

            S… 

Shaka Ponk : Délire raté…

 Le 17 mars, sortait le nouvel album de Shaka Ponk, intitulé The White Pixel Ape. Très attendu par le public ainsi que la presse (notamment grâce à une communication sciemment étudiée et à leur présence annoncée  sur quasiment toutes les affiches des festivals de cet été) The White Pixel Ape devait signer le retour des performers les plus déjantés et expérimentaux de la scène française. « Devait » parce qu’à la fin de l’écoute, la déception est grande.

Qui êtes-vous et qu’avez-vous fait de Shaka Ponk ? The Geeks in The Jerkin’ Socks, sorti en 2011, était un album différent et foncièrement travaillé pour être apprécié des fans spéciaux de Shaka Ponk et d’un plus large public assez ouvert d’esprit. The White Pixel Ape, paru sur le label Tôt ou Tard, est le quatrième enregistrement du groupe de rock expérimental. Cependant, l’expérimentation dans cet album a perdu tous son sens initial qui est avant tout de faire différent, tout en sonnant Rock. The White Pixel Ape est composé principalement de titres décevants, sans âme et sans saveur. Evidemment, la signature Shaka Ponk est toujours bien présente, avec des sons industriels, électroniques, et des mélanges de genres musicaux qui malheureusement ne sont ici pas réussis. Chaque morceau semble avoir été gâché par un ou des éléments qui n’ont rien à faire là. Lucky G1rl, pour commencer, possède un riff efficace mais le titre tout entier devient digne d’un groupe de campus/skate/rock de collège. On retrouve cette régression musicale dans Last Alone (tout est dans le titre), qui se comparerait presque à un rock dark dégoulinant que les ados émos ont  l’habitude d’écouter. Tristesse. La plupart des mélodies sont simples, peu recherchées, et ennuyeuses. Le gros défaut de cet album c’est que, malgré ses sonorités lourdes, agressives et rythmées, il ne possède aucune énergie. Sur quoi les gens vont-ils pouvoir pogoter dans la fosse lors des concerts ? Certainement pas sur Story O’ My LF, bien que cette chanson déjantée, entre rap et rock, soit une des seules à ne pas devoir être jetée : le son est sympa, et plus créatif. Il faut attendre le titre numéro 5 de la tracklist pour entendre quelque chose de décalé, drôle et d’un peu original : Black Listed, caractérisé par de grosses influences « métal » et « core » qu’on retrouve dans la batterie et dans les guitares extrêmement rapides. Gimme Guitarrrra qui, même avec un refrain intéressant, ressemble à un morceau tiré du précédent album, mal remixé, avec des faux-airs de pop sur la partie chantée. 6xLove est peut-être la seule chanson qui vaut le coup d’être réécoutée plusieurs fois. Scarify et Wanna Get Free sont ennuyeux et lassants, malgré les apparences. L’ennui ! Est-ce normal de s’ennuyer sur un album de Shaka Ponk ? Le délirant, certes, W0tz Goin’ 0n semble avoir été écrit n’importe comment et cela donne… n’importe quoi ! Un festival du délire raté. Faut-il s’attarder sur le sincèrement horrible Ano Eloquent, qui évoque une drôle d’électro de mauvais goût, cheap et ringarde ? Seul le pont sur ce morceau reste appréciable.

Des titres inachevés. C’est la sensation que donne l’ensemble de cet album, comme si des milliers d’idées avaient été empilées là, aléatoirement, sans repassées derrière. L’énergie caractéristique a l’air d’avoir disparu pour donner naissance à des mélodies banales, faciles et déjà entendues. Il manque cruellement de titres pour « pogoter », le propre même d’un concert de Shaka Ponk. Tout au long de l’album, on attend désespérément que quelque chose en surgisse. Mais ici, rien n’est surprenant si ce n’est le manque d’originalité et de créativité. L’album reflète une étrange superficialité, avec plus de forme que de fond. Shaka Ponk voulait peut-être marquer le coup auprès du grand public et passer sur les radios à défaut de penser à son public, qui lui n’a jamais oublié Bad Porn Movie. S’il ne faut pas comparer les albums entre eux, chacun ayant son propre univers, sa propre griffe, Shaka Ponk a déçu avec The White Pixel Ape : on ne les reconnaît plus, on se sent presque trahi. A trop vouloir contenter l’opinion, Shaka Ponk a finalement raté son coup.

J’aurais préféré ne jamais à avoir à écrire une critique négative sur Shaka Ponk, que je suis depuis leurs débuts, depuis Bad Porn Movie et How To Kill Stars. Après 10 longues années de dur labeur, le talent du groupe si dur à identifier était enfin reconnu avec l’album The Geeks in The Jerkin’ Socks. Alors, je décide d’accepter cet album, The White Pixel Ape, que je vois comme un accident de parcours. J’attends avec impatience le prochain, que j’imagine comme un retour aux sources, qui surprendra et qui leur ressemblera. J’ai foi en Shaka Ponk, marginal et reconnu, décalé et adoré, un groupe de scène, qui saura, j’en suis sûre, se retrouver dans les méandres difficiles du rock et de la musique.

 

Juliette Geenens a.k.a Vodoo Kid

 

Une réflexion sur “Shaka Ponk: The White Pixel Ape. La double review du PDR

  1. « On pourrait peut-être reprocher ici au groupe le manque de ligne directive »
    « Comme si des milliers d’idées avaient été empilées là, aléatoirement, sans repassées derrière. »

    Pour ma part, je n’ai pas encore écouté l’album mais on peut faire le même constat rien que devant le clip de « Wanna Get Free », on dirait qu’ils ont investi dans tous les effets spéciaux, décors et costumes possibles., L’ensemble ne ressemble à rien visuellement. C’est dommage, ils ont un bon potentiel.

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