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Mama Rosin: De la Suisse naturellement

Chaque jour dans le Monde, des centaines de pays sont victimes de clichés redondants qui leurs collent à la peau et la Suisse ne fait guère office d’exception. On ne compte plus les innombrables liens que font les gens entre la nation neutre et le chocolat, les horloges, Roger Federer, les exilés fiscaux et la fondue. À croire qu’il y a que ça là-bas ! Voilà pourquoi cette fois-ci, Le Peuple du Rock vous fait un peu sortir des sentiers battus avec la présentation d’un groupe aux accents helvétiques, Mama Rosin.

Ce trio rock’n’roll originaire de Genève compte dans ses rangs des amoureux de l’ancien mais avant tout de la musique au sens premier du terme. Parmi ces amoureux figure Robin Girod au chant, à la guitare et au banjo. Pour l’accompagner, il y a Cyril Yeterian, également au chant mais aussi à l’accordéon, au gros récipient en verre, au triangle, à la planche à gratter et j’en passe ainsi… Et que de Xavier Bray est aux percussions. Ils se chargent depuis 2007 de dépoussiérer la vieille musique Louisianaise du XIXème siècle. Un parti pris qui force l’intérêt, d’autant plus qu’ils restent assez fidèle à ce qu’il se faisait à l’époque. En effet, leurs sonorités ne sont pas sans rappeler celles empruntées à la musique cajun, un courant musical joyeux et festif, grandement influencé par l’accordéon et qui, à l’instar du blues, n’a jamais cessé d’évoluer avec son temps.

Mama Rosin

Mama Rosin

C’est donc en 2008, le 2 octobre plus précisément (la sortie de leur premier album), que commence véritablement l’aventure pour les Mama Rosin. Ils signent avec l’insolite label Voodoo Rythm Records, situé à Berne, où ils vont enregistrer plusieurs de leurs albums avant de créer leur «Moi Jconnais». Ils le nomment Tu as perdu ton chemin et force est de constater que pour une première, c’est vraiment bon. Alors évidemment, on est loin de quelque chose de conventionnel. En fait, on est face à un vieux blues créole fanfaron des années 1900 où le son de l’accordéon ressort très souvent. Un vieux blues moite qui crépite comme une galette sur un tourne-disque, embrassant langoureusement les Caraïbes, la camaraderie et la bonne humeur.

Quelle mélange mais la sauce prend. La voix pincée de Robin Girot posée sur les chants criards de Cyril Yeterian collent parfaitement à l’ambiance souhaitée. Pour vous en convaincre, écoutez donc The Story of Mama Rosin ou Les Secrets D’Evangeline. Humez le Black Nero Harp pour sa démonstration de blues afro-américaine géniale. Laissez-vous séduire par l’appel de Dancing Shoes, ou apprenez avec le lancinant La Valse Criminelle. C’est simple, franc et on aime. Suite à la sortie de leur second album Black Robert l’année suivante (probablement un hommage au grand blues man Robert Johnson), les choses se précisent et on est bien content d’écouter à nouveau du bon son cajun avec une teinte un peu plus rock’n’roll (l’excellent Marinière).

Ceci étant, on détonera à travers leur démarche la particularité d’être plutôt atypique. Effectivement, il n’y a pas vraiment de structure dans la composition, ça va comme ça vient.

 On enregistre en une prise et on improvise si besoin est. Un peu comme les Kinks à leur début, à l’ancienne quoi et c’est justement ça qui est vraiment appréciable chez eux. Ils ne se prennent pas le chou et ils vont là où le vent les mène à tel point qu’on les voit vite remplir les petites salles de concert qu’ils écument aux quatre coins de la planète. Paradoxalement, c’est partout sauf en Suisse qu’on parle de Mama Rosin (Vous m’en direz tant..).

À ce sujet, beaucoup de ceux qui les ont vu jouer sur scène ont vraiment été emballés par leurs prestations uniques. Certains parlent même d’expérience, d’émotion à faire partager. On dit même que c’est leur grand kiffe mais avant tout leur grande force. Avouez que c’est quand même pas mal vendeur, vous ne trouvez pas ?

Qu’à cela ne tienne. C’est suite à plusieurs passages remarqués en Allemagne, en Hollande et notamment en Angleterre que le trio grandit. On les retrouvera même dans la célèbre émission de télé Jools Holland Show, sur la BBC. Oui, même si en Suisse on ne les connaît pas beaucoup, en Angleterre en revanche, on les comprend. Un style underground un peu à l’arrache, sans complexe et insoucieux, presque punk. Forcément, ça plait beaucoup aux british.

Les Mama Rosin ont le vent en poupe. Leur public s’agrandit et c’est  bientôt le fameux Jon Spencer du Jon Spencer Blues Explosion qui tombe à tout hasard sur leur travail. Ce dernier, en pleine tournée en Europe avec son autre groupe Heavy Trash, leur propose carrément de faire sa première partie de concert et sur le fil, d’enregistrer avec lui. Loin d’être inconnu au bataillon, Jon Spencer va les conseiller sur les méthodes d’enregistrement dans son studio à NYC s’il vous plaît, durant quelques jours. Un honneur qu’ils ont du mal à réaliser mais voici que sort le 10 octobre 2012 Bye Bye Bayou (décidément un mois béni), leur dernier LP cuisiné aux petits oignons grâce au chef Jon Spencer.

Au final, Bye Bye Bayou ne dépayse pas. Fidèle à ses prédécesseurs, on sent malgré tout une évolution dans leur son. Plus travaillé, plus rock encore, plus distinct et mieux maîtrisé. Qui ne ressent pas une furieuse envie de sauter dans tous les sens en écoutant le titre Casse mes objets/ You broke my Stuff ? Et n’en déplaisent pas aux fans de la première heure de voir que le groupe n’oublie pas ses racines louisianaises avec les morceaux Marilou ou Seco e Molhado. À écouter impérativement !

En fin de compte, Mama Rosin, c’est un peu comme une petite barque qui traverse le Bayou. Elle navigue dans les eaux sinueuses sans se préoccuper des alligators ou autres bébêtes qui rôdent autour. Où va-t-elle ? Quelle importance. Elle trace sa route et c’est tant mieux. Après plusieurs dates au mois de février de cette année à Paris, ils seront en tournée au Canada, le pays du caribou (moi aussi je m’y mets…) du 27 au 30 Juin 2013 puis le 04 août au festival Esperanzah en Belgique aux côtés de Woodkid avant de partir en Angleterre au Greenbelt Festival à Cheltenham dans leurs terres promises.

By Marcus Bielak

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