Grands Classiques

Jean-Patrick Capdevielle, le rocker autodidacte

Les anarchistes et révolutionnaires sont souvent peu aimés dans notre monde. Et pourtant, c’est elle qui a rythmé notre République actuelle, et c’est elle qui agite le monde arabe actuellement. Elle est menée souvent par des leaders. En musique, notre révolution fut en 1962, lorsque 4 garçons dans le vent ont débarqué dans des stades. Avant eux, Elvis (Pelvis) Presley. Après eux… Oui, on pourrait se poser la question, surtout en France.

La musique est souvent un thème qui en France se métamorphose en chanson. On dit bien « la chanson française » , celle de Brassens, Brel, Ferré et autres. On honnit les stars yéyé, et on fait remonter souvent le rock français à Téléphone. Justement, ce groupe, issu de la révolution punk (encore elle) est arrivé dans un moment de frénétique libération. C’est cette même mouvance de la fin des années 70 qui voit arriver un « ange des ténèbres » : Jean Patrick Capdevielle.

Jean-Patrick Capdevielle, les premiers succés à l'aube des eighties

Pourtant, Capdevielle n’est pas véritablement un punker. Issu du baby boom, il a vu passer toutes les formes de révolution, et lui-même s’y est adonné. Il est véritablement un autodidacte, véritable touche-à-tout. Des yé-yé aux hippies, il est polyvalent. C’est ainsi qu’il laisse tomber les études d’économie et de médecine pour devenir photographe, puis journaliste à Salut Les Copains, Actuel… Décidant de s’affranchir de la tutelle parentale, il se paye les voyages qu’il rêve, d’Ibiza à New York et surtout l’underground Londonien. C’est d’ailleurs ici qu’il fait une rencontre déterminante pour sa vie future : Eric Clapton. A coup sur, et à la lumière de sa vie toute entière, ce fut une grande rencontre, qu’il raconte non sans émotion aujourd’hui.

Son premier amour est pourtant la peinture. Mais, ce jeune artiste trouve un jour une guitare, et se lance un nouveau défi. Il a quelques textes de coté. En effet, c’est un écrivain né, et connaissant les rudiments de la guitare, et se débrouillant bien en outre, il décide de tenter sa chance. En 1978, sur le label de William Sheller, il sort Solitude. C’est un grand succès. Il passe sur pas mal de radios. Se retrouvant sans contrat après la faillite du label, avec un tube, et des chansons en stock, de nombreux producteurs s’intéressent à lui. Gerry Gil va lui donner les moyens pour son projet. Son nom : Les Enfants des Ténèbres et les Anges de la Rue, son premier album qui sort à la fin des seventies. C’est un album résolument rock,  complexe mais très intéressant. Il n’est pas punk. Mais, il est doté de nombreux textes et mélodies rappelant l’Angleterre. On peut citer Coup D’Semonce (se plaçant dans la lignée de Mark Bolan et T-Rex), Quarante-Trois Souvenirs, Elle est Comme Personne, ou encore Salomé. Ces mélodies rappellent Dylan, ou même Springsteen, voir précèdent Goldman. Dans tous les cas, l’album contient ce qui sera le plus gros tube de Capdevielle : Quand T’est Dans le Désert. Ce titre est souvent perçu comme un hymne d’une génération, la génération des espoirs déçus de Mai 68. Il se vend à 1 million d’exemplaires pour l’année 1980. Espoir précoce de la musique, il se produit à l’Olympia en février. Il est à l’apogée de sa carrière médiatique.

Salomé, un des succés de Jean-Patrick Capdevielle, aux accents dylaniens prononcés

Surfant sur la vague de son succès mélodieux et intuitif, il sort en 1980 l’album 2, comme la suite de son aventure. Il nous livre ici des chansons aussi intéressantes que Oh Chiquita, C’est dur d’être un héros, ou encore Barcelone. Dans la veine du précédent, cet album est un pur chef d’œuvre, aux paroles complexes et aux mélodies extraordinaires.

Les médias sont ravis, le public est conquis, son aventure est bien lancée. Arrive alors son troisième album, Le Long de la Jetée. C’est  » l’album de la déroute » : il fait appel à des cuivres se rangeant plus dans le style rock californien. C’est ce qui déplaira aux puristes du rock-punk préférant de loin le style de Téléphone qui à la même époque sort Argent Trop Cher. Alors, que Capdevielle, lui, sort des chansons comme Señorita ou Ce coté de la ville. Cet album respire l’Amérique de Hall & Oates, de Springsteen, ou même Gerry Rafferty. Mais, c’est bien connu, la France n’aime pas trop ce genre de musique. C’est ainsi que Capdevielle se trouve cloué au pilori de la musique rock, par les critiques et une partie du public. Pourtant, cet album doit être réhabilité. Il est complètement d’influence nord-américaine.  La concrétisation de ce nouveau tournant dans la vie déjà chargée de Capdevielle se trouve dans L’Ennemi Public, album de 1982, enregistré à New York et non à Londres comme les autres. Les critiques le descendent en flèche, et le voici parti dans une traversée du désert. Jamais sa chanson Quand t’est dans le désert, prémonitoire, n’aura pris un aussi bon sens.

Jean-Patrick Capdevielle, à l'Olympia en 1982

Nous prouvant dés lors que C’est dur d’être un héros, il ne s’arrête pas moins d’écrire ni de travailler. En effet, déjà, il écrit de nombreux scénarios pour la télé, refusé à cause de sa prétendue réputation. Il ne tirera pas que des avantages de cette aventure. En tout cas, son style, hybride, est perceptible à des miles .

Ses albums suivant passeront inaperçus : Mauvaise Fréquentation, album à la pochette volontairement provocatrice,  sort en 1984, Planète X sort en 1985, Vue Sur Cour sort en 1990. Durant ces années, Capdevielle se consacre à la production, notamment musicale (en témoigne l’album Traces de Linda Williams en 1988) mais aussi cinématographique en association avec Paco Rabanne entre autres. Malheureusement, ces différentes choses n’aboutissent peu médiatiquement parlant.

Son vrai comeback dans la chanson, il le fait en 1992, par l’album Vertigo (à ne pas confondre avec la chanson de U2, et porté par la chanson Black Bone. Suit aussi l’album-compilation Politiquement Correct en 1995, porté par l’excellente chanson inédite éponyme. Les deux albums sont vraiment très bon, et il se révèle une seconde fois lors de son passage à Taratata ou son duo avec Hubert Felix Thiéfaine pour chanter Don’t Think Twice It’s All Right de Dylan est mémorable.

Jean-Patrick Capdevielle, en 1995

Même si les fans sont toujours au rendez-vous, Capdevielle est toujours là ou ne l’attend pas. La preuve, puisqu’il se tourne vers un domaine particulier : il écrit un album classique, Carmine Meo. Chanté par la soprano Emma Shapplin, il démontre ainsi encore son talent d’écriture en écrivant en Italien du XIVe siècle. Il rencontre un succès international obtenant 39 disques d’or et 17 de platine. Il réédite le succès en 2001 avec Atylantos, un album inspiré de la légende de l’Atlantide.

Dans ce nouveau créneau, considéré par certains comme un Mozart post-rock, il revient à ses racines avec l’excellent Hérétique #13, porté par le single « Swingin’ London » Miss Démocratie, qui à travers l’expression d’un américanisme trop présent en Occident, nous démontre que Capdevielle sait quand même vivre avec son temps et à encore des choses à dire. De même, il s’est entouré de grands musiciens comme par exemple David Hallyday à la batterie.

Jean-Patrick Capdevielle, en 2006 avec une peinture de sa composition, "Le chant du serpent"

Car il faut conclure, il faut bien dire que Jean Patrick Capdevielle est un personnage éclectique, à la fois producteur, scénariste, auteur-compositeur-interprète, autodidacte, écrivain, peintre même. Il ira même jusqu’à fonder un site-forum, et une radio ou tout le monde programme ce qu’il veut. Cela dit, il est réservé et depuis 3 ans, on le voit peu dans les médias. Il n’est plus aussi accrocheur que certains.

Alors, une question vous brûle les lèvres chers lecteurs, j’en suis sur. Pourquoi préférer parler de Capdevielle alors qu’il y a quelques semaines on retrouvait Gary Moore, le bluesman, mort dans une chambre d’hôtel en Espagne ? Pour la similitude, je vous répondrais. Gary Moore est connu pour Parisienne Walkways et souvent en est réduit à cela, alors qu’il a quand même fait partie d’un groupe comme Thin Lizzy, et qu’il a collaboré avec de grands bluesmen comme B.B.King. Jean Patrick Capdevielle est du même acabit : guitariste et parolier de talent, il est souvent réduit à Quand T’Es Dans Le Désert, et souvent oublié dans les présentations d’artistes représentatifs des seventies, et cela malgré son large panel d’activités faites dans sa vie personnelle et privée, comme j’ai essayé de le montrer.

Gary Moore et Jean-Patrick Capdevielle, un bluesman efficace et un parolier complexe

Outre l’amour du blues qui les réunit, le parallèle est flagrant, et surtout annonciateur d’un fait : les gens de talent sont souvent peu reconnus, ou seulement après leur mort. Le cas de Gary Moore est assez significatif de cela. Le talent vient souvent avec la mort.

Pour finir trivialement, je souhaite longue vie artistique à Jean Patrick Capdevielle, que l’inspiration soit là, et qu’il puisse enfin sortir de sa torpeur médiatique autre part que chez Patrick Sébastien.

Et puis, il faut donc dire adieu à Gary Moore. Il ne restera plus que Michael Gregorio pour te faire vivre, toi et ta guitare, à travers son imitation parfaite. En tout cas, ta musique sera toujours là. The Blues Is Alright, n’est-ce pas ?

By Mickael Chailloux

6 réflexions sur “Jean-Patrick Capdevielle, le rocker autodidacte

  1. Et aussi que tu est un artiste, un vrai. Je t aura pas vraiment vu faire mèdecine, meme si c est un beau mètier. Je pense que tu ètait nèe pour la chanson. Tu as ton style bien a toi, ta musique. Un enorme regret pour moi, avoir louper tes dèbuts, je n ètait pas nèe. J ai aussi dècouvert beaucoup de choses sur toi a youtube. Tu accroche le public. Je deviens fan sans etre fanatique, car la fanatisme est dangereux. On peut se perdre. J ècoute ènormèment celle qui t aimais. Une chanson qui me touche particulièrement. Un peu comme un reflet, un miroir. Mon histoire en sens inverse puisque c est mon père qui est parti. J ai besoin de l ecouter, cela m aide a faire ressortir par les larmes ce que je n arrive pas a dire avec des mots. Bisous jpc.

  2. Excellent article qui m’a éclairé sur la disparition médiatique de cet artiste, c’est bien triste que les médias ont occulté cet artiste a toute une génération c’est pour moi dommage…mais je me dis aussi que grâce a des sites comme le « Peuple du Rock » rien n’est perdu et que je vais pouvoir découvrir ce que J.P Capdevielle a pu écrire . En
    core bravo pour cet article et longue à J.P Capdevielle

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