Review

PUTS MARIE : MASOCH I-II

Depuis de longues années, la notion de neutralité de la Suisse nous est vantée. Mais ceci est erronée depuis le 9 octobre, date à laquelle elle nous lâche une bombe (pacifique et musicale) nommée Puts Marie. On a longtemps et à juste titre été attiré par les mérites de la scène rock belge, voici que les Helvètes s’y mettent aussi. Si vous cherchiez l’album de cet automne, on peut vous dire qu’il vient de sortir c’est Masoch I-II.

Puts Marie existe et végète depuis 15 ans et sort paradoxalement son premier LP combinant deux EP Masoch I et forcément Masoch II. Douze titres qui ne pourront laisser personne indifférent tant ils sont variés dans les influences, les approches et les orchestrations. Mais, ils ont tous en commun d’être sur le fil du rasoir, sombres et joliment mélancoliques.

Il y a beaucoup de soul dans cet album. On retrouve dans la voix de Max Usata des teintes de celle d’Ottis Redding voire même de Ray Charles dans Tell Her to Come On Home ou Obituaries, ballade soul par excellence qui vous berce doucement, accentuée d’une partie piano légèrement jazzy. C’est d’ailleurs aussi une ballade qui ouvre l’album : A quantum Of Sun qui est à l’image de l’album : le calme avant la tempête, puis après la tempête vient le beau temps. Max Usuta vous hypnotise avec des montées de voix dans les aiguës avec une lead guitare au son vintage légèrement saturé, puis une partie instrumentale de plus en plus pesante sans jamais être lourde s’intercale pour retomber sur le couplet initial. Pornstar est à l’opposé du premier morceau, alliant étonnamment couplet hip-hop et refrain entêtant limite crooner. Exercice de style parfaitement réussi. The Bathhouse et Lost Soul qui suivent sont deux morceaux pop aux sonorités dEUS.

Puts Marie 1

Ce qu’aime bien Puts Marie, c’est de passer de parties calmes à d’autres plus puissantes voire apocalyptiques, comme pour déstabiliser l’auditeur, le prendre à contre-pied et le laisser s’imaginer le déroulement du morceau et lui faire faux bond. All Your Am I,morceau par lequel j’ai connu le quintet suisse, est la lovesong désespérée par excellence. Douce complainte au début pour terminer en instrumental envoûtant aux guitares bruyantes et acérées. Mob Kisses qui commence par un mur de son bien grunge pour terminer tout en douceur, nous tient en haleine tout au long du morceau avec des montées qui avortent à chaque fois. Une petite frustration sûrement calculée, voulue tant il aurait étaient évident de faire le contraire. Jubilatoire.

L’inventaire des styles continue avec Hecho in Mexico que les membres du groupe qualifient de groove mariachi. Puis vient Horse Gone Far, un blues garage sombre à souhait qui colle parfaitement à la voix et au chant dépressif de Max Usata qui réalise un grand écart sur le morceau suivant : Brush Air. Genre de tango cabaret avec une voix susurrée, ultra-aigüe, qui explose avec un final fuzz et psychédélique. Il manquait à la liste un morceau un peu grunge et c’est chose faite avec Sugar Run que Nirvana ne pourrait renier. Efficace.

Pour terminer l’album, les Biennois nous emmènent sur les terres de la Motown avec un morceau bien soul 60’s.

En abordant différents styles, on aurait pu craindre à un album catalogue. Mais Puts Marie a su créer une atmosphère sur ce LP qui le rend homogène. Tout y est : mélodies ciselées, chant envoûtant, instrumentaux planants, Masoch I-II est l’album qui vous fera passer par toutes les émotions. Si l’album vous cocoonera chez vous au coin du feu (ou du radiateur), Puts Marie passe en France en novembre et leur réputation scénique  n’est déjà plus à faire. Vous savez donc ce qu’il vous reste à faire, en tout cas on y sera et on vous racontera…

Sylvain Chamu