Il y a deux semaines sortait le premier album solo de Jack White, présenté comme son « debut album », ce qu’il n’est pas vraiment vu la carrière de White et son statut de rocker déjà bien installé, voire indétrônable dans l’univers du Rock d’aujourd’hui.
Même si les thèmes récurrents que l’on peut trouver sur Blunderbuss abordent la séparation, n’allez pas croire que cet album, essentiellement composé autour d’un piano et d’une guitare, tourne autour de son récent divorce, il n’en est rien. Karen Elson y assure les backing vocals tout du long et sa prestation sur « Love Interruption » apporte d’ailleurs tout son contraste au morceau. Ou alors c’est une thérapie d’ancien couple. Toujours cette culture de l’ambivalence chez White. Ambivalence qui se traduit par une certaine contradiction dans l’enchaînement même de cet album.
Blunderbuss est loin d’être un mauvais album, il est même très bon, mais honnêtement je m’attendais à autre chose, un au-delà de ce que Jack White faisait jusqu’à présent. En effet celui-ci ayant enchainé les collaborations, les groupes, il attaquait ici un projet personnel, totalement en solo (écrit, enregistré et produit). Je pensais donc qu’avec son bagage énorme et son talent de songwriter qui n’est plus à démontrer, qu’il allait faire un truc vraiment venu d’ailleurs. Mais non, White semble toujours vouloir pousser plus loin dans son irrésistible envie de devenir un Bluesman oldschool faisant de la très bonne pop ( « I’m Shakin’ » ou encore « Trash Tongue Talker »), au risque de se perdre un peu en chemin sur quelques morceaux qui ne parviennent pas à décoller vraiment, je pense à « I Guess I Should Sleep » notamment, lorgnant un peu du côté d’une country mutante. C’est d’autant plus dommage que des bijoux comme « Sixteen Saltines » ou encore « Missing Pieces » semblent à des années lumières des morceaux cités plus haut. « Love Interruption » est aussi, d’après moi, un des meilleurs morceaux de l’album alors qu’ « Hypocritical Kiss », « Take Me With You When You Go », ou encore « On and On and On » me semblent plus dispensables par exemple. Notons tout de même un « Weep Themselves to Sleep » assez Pink Floydien époque Final Cut ou un « Hip (Eponymous) Poor Boy » très T. Rexien, enfin ce ressenti reste très personnel, ce sera à vous d’en juger.
Je ne vois donc dans cet album qu’une évolution restant très loin de la révolution que j’attendais. Je l’écoute cependant assez souvent depuis sa sortie car comme je l’ai dit cela reste un bon LP, avec un très bon song writing chargé de doubles sens pas piqués des vers, parfois mélancolique sur les relations qui se perdent, parfois violent, mais présentant toujours des images très fortes. Et c’est ce qui rend cet album assez contradictoire pour moi car ce song writing aurait je crois mérité de soigner beaucoup plus la musique ou du moins d’être plus avant-gardiste car elle ne rend pas justice à des textes assez riches, du genre à vous faire piquer du regard par terre pour y penser ou carrément jeter au feu rageur du langage crû, mais non moins vrai d’ailleurs.
Ensemble en demi teinte pour moi donc, mais qui restera certainement comme un album marquant cette année pour tous ceux qui suivent la carrière de Jack White.
By Greg Pinaud-Plazanet
Une critique intelligente, posée, calme, sans « fanitude » idiote, ça fait du bien. Beaucoup de bon sens critique dans cette page. Je connais mal Jack White (Stripes trop minimalistes, Dead Weather trop lourd (pour moi), Raconteurs ok mais je suis fan de Brendan Benson et j’aime cet album solo. Ce que j’aime dans cette critique, c’est qu’il y a de la perspective, de la distance, une critique quoi… Keep on Keepin’ on!